L'impact de Tristes Tropiques sur la pensée du vingtième siècle est immense. Traduit en 27 langues.L'impact de Tristes Tropiques sur la pensée du vingtième siècle est immense.
Pourquoi et comment devient-on ethnologue ? Comment les aventures de l'explorateur et les recherches du savant s'intègrent-elles et forment-elles l'expérience propre à l'ethnologue ? C'est à ces questions que l'auteur, philosophe et moraliste autant qu'ethnographe, s'est efforcé de répondre en confrontant ses souvenirs parfois anciens, et se rapportant aussi bien à l'Asie qu'à l'Amérique.
Claude Lévi-Strauss souhaite ainsi renouer avec la tradition du voyage philosophique illustrée par la littérature depuis le XVIème siècle jusqu'au milieu du XIXème siècle, c'est à dire avant qu'une austérité scientifique mal comprise d'une part, le goût impudique du sensationnel de l'autre n'aient fait oublier qu'on court le monde, d'abord, à la recherche de soi.
Après avoir travaillé en Alaska avec le peuple Gwich'in, Nastassja Martin a franchi le détroit de Béring pour entamer une recherche comparative au Kamtchatka. Pendant l'époque soviétique, les Even, peuple nomade d'éleveurs de rennes, ont été sédentarisés dans des fermes collectives. Après la chute du régime, beaucoup ont continué d'être les bergers des rennes qui ne leur appartenaient plus, les troupeaux étant aux mains d'entreprises privées. Depuis l'ouverture de la région en 1991, les anciens kolkhozes du Kamtchatka se transforment en plateformes touristiques.
En 1989, juste avant la chute de l'Union soviétique, une famille even aurait décidé de repartir en forêt, recréer un mode de vie autonome fondé sur la chasse, la pêche et la cueillette. Était-ce une légende ? Comment un petit collectif violenté, spolié, asservi par les colons avant d'être oublié de la grande histoire s'est-il saisi de la crise systémique pour regagner son autonomie ? Comment a-t-il fait pour renouer les fils ténus du dialogue quotidien qui le liait aux animaux et éléments, sans le secours des chamanes éliminés par le processus colonial ? Quelles manières de vivre les Even d'Icha ont-ils réinventées, pour continuer d'exister dans un monde rapidement transformé sous les coups de boutoir de l'extractivisme et du changement climatique ?
Dans ce livre, où les rêves performatifs et les histoires mythiques répondent aux politiques d'assimilation comme au dérèglement des écosystèmes, l'autrice fait dialoguer histoire coloniale et cosmologies autochtones en restituant leurs puissances aux voix multiples qui confèrent au monde sa vitalité.
C'est l'hiver et la température avoisine les moins quarante degrés. Les yeux levés vers les aurores boréales qui animent le ciel arctique, nous écoutons. Le chasseur commence à siffler dans leur direction. C'est un son continu, aigu mais contenu, qui résonne dans le silence de la nuit polaire. Qui appelles-tu ? Elles, les aurores, et ceux qui transitent avec elles, les esprits des disparus, des hommes, des animaux, des plantes, qui courent sur un ciel glacial dans les explosions de couleurs. Qui sont ces hommes qui se nomment eux-mêmes les Gwich'in et peuplent les forêts subarctiques ? Et que dire du territoire qu'ils habitent, l'Alaska contemporaine ?
À l'heure du réchauffement climatique les mutations écologiques du Grand Nord sont telles qu'elles brouillent le sens commun et balayent toutes les tentatives de stabilisation, de normalisation et d'administration des écosystèmes arctiques et de leurs habitants. Loin de toute folklorisation indigéniste et de tout manifeste écologiste, ce livre s'attache à retranscrire les réalités des hommes qui parlent encore à l'ombre des arbres et sous le sceau de leur secret. Les âmes sauvages de l'Alaska sont celles qui se meuvent dans les plis d'un monde en révolution, et qui font de la métamorphose continuelle des choses et de l'incertitude des êtres un mode d'existence à part entière.
Il en va des civilisations et peuples comme des étoiles : ils naissent, s'épanouissent et disparaissent. Sumériens, Spartiates, Étrusques, Mochicas, Aksoumites, Mayas ou nomades mongols ont en commun d'avoir, durant plusieurs siècles ou quelques décennies, connu un mode de vie remarquable, développé des savoir-faire élaborés, brillé par leurs réalisations artistiques, leur culture, leur médecine ou leur connaissance des astres.
Aztèques au funeste calendrier, Pascuans aux étranges Moai scrutant l'horizon, ou plus près de nous Tasmaniens et Héréros au tragique destin, Onas et Alakalufs de la Terre de Feu, cet atlas invite à une exploration poétique du monde, à une rencontre avec quelques unes des civilisations brillantes ou plus obscures, qui jalonnèrent l'Histoire.
« Quand, dans la société primitive, l'économique se laisse repérer comme champ autonome et défini, quand l'activité de production devient travail aliéné, comptabilisé et imposé par ceux qui vont jouir des fruits de ce travail, c'est que la société n'est plus primitive, c'est qu'elle est devenue une société divisée en dominants et dominés, en maîtres et sujets, c'est qu'elle a cessé d'exorciser ce qui est destiné à la tuer : le pouvoir et le respect du pouvoir. La division majeure de la société, celle qui fonde toutes les autres, y compris sans doute la division du travail, c'est la nouvelle disposition verticale entre la base et le sommet, c'est la grande coupure politique entre détenteurs de la force, qu'elle soit guerrière ou religieuse, et assujettis à cette force. La relation politique de pouvoir précède et fonde la relation économique d'exploitation. Avant d'être économique, l'aliénation est politique, le pouvoir est avant le travail, l'économique est une dérive du politique, l'émergence de l'État détermine l'apparition des classes. » P.C.
Fort de son immersion dans la société chinoise depuis près de cinquante ans, Patrice Fava a parcouru la Chine et fait de nombreuses découvertes dans des régions fort peu visitées. Ses mémoires ont le projet de dissiper l'ignorance très générale du monde occidental vis-à-vis de la culture chinoise et de ses racines. De l'arrière-pays du Shandong où vit sa famille chinoise, aux forteresses Hakka du Fujian ; du village de Zhang Guying à la montagne de l'immortel Ge ; du Temple des nuages blancs au pèlerinage de Miaofengshan, il parle d'une Chine que peu de gens connaissent. Après "l'ouverture" des années 1980 qui a tenté de briser l'isolement dans lequel Mao avait enfermé son pays, la société tout entière n'a cessé de se réinventer. C'est cette Chine non-officielle que l'auteur explore. Les multiples références aux travaux de sinologues, en particulier de Kristofer Schipper et de Simon Leys, mais aussi d'anthropologues et d'historiens comme Philippe Descola, Bruno Latour ou Marcel Gauchet lui permettent de donner un éclairage très nouveau aux réalités complexes de la société chinoise dont, en général, on ne perçoit ni la profondeur historique, ni le substrat théorique.
L'étude de la pensée à l'état sauvage, florissante dans tout esprit d'homme tant qu'elle n'est pas cultivée et domestiquée pour accroître son rendement.
" La Pensée sauvage ", et non " la pensée des sauvages ". Car ce livre s'écarte de l'ethnologie traditionnelle en prenant pour thème un attribut universel de l'esprit humain : la pensée à l'état sauvage, florissante dans tout esprit d'homme - contemporain ou ancien, proche ou lointain - tant qu'elle n'est pas cultivée et domestiquée pour accroître son rendement. Sans doute peut-on chercher des exemples auprès des sociétés sans écriture et sans machines ; même là pourtant, cette pensée ressemble singulièrement à celle que nous trouvons à l'oeuvre tout près de nous, dans la poésie et dans l'art, ou encore dans les diverses formes du savoir populaire, qu'il soit archaïque ou récent. En elle, rien de désordonné ni de confus. Partant d'une observation du monde qui témoigne d'une minutie et d'un précision souvent stupéfiantes, elle analyse, distingue, classe, combine, et oppose... Dans ce livre par conséquent, les mythes, les rites, les croyances, et les autres faits de culture, se manifestent comme êtres " sauvages " comparables, par delà le langage, à tous ceux que la nature (dont l'esprit humain ne peut être retranché) engendre aussi sous d'innombrables formes animales, végétales, et minérales. On ne saurait donc s'étonner que, dans leur fréquentation millénaire, la pensée sauvage ait trouvé la matière et l'inspiration d'une logique dont les lois se bornent à transposer les propriétés du réel, et qui, pour cette raison même, a pu permettre aux hommes d'avoir prise sur lui.
Un hommage à l'esprit de résistance jivaro contre toute politique d'assimilation.
On les appelle Jivaros. Ils préfèrent se dénommer Achuar, les Gens du Palmier d'eau. Isolés dans la jungle de Haute-Amazonie, aux confins de l'Equateur et du Pérou, cette tribu légendaire fut protégée durant des siècles de l'incursion des Blancs par son inquiétante réputation de chasseurs de têtes. Plus qu'une condition de leur indépendance, la guerre est pour ces Indiens une vertu cardinale ; elle donne du prestige, renforce la solidarité, raffermit l'identité ethnique et permet le renouvellement rituel des âmes. Grâce à elle, les Achuar sont encore plusieurs milliers, fiers de leurs traditions et farouchement attachés à leur mode de vie. Ce livre est une chronique de leur découverte et un hommage à leur résistance.
L'auteur y relate au quotidien les étapes d'une intimité affective et intellectuelle croissante avec ce peuple dont il a partagé l'existence pendant près de trois années comme anthropologue. Tableau des temps ordinaires comme des événements tragiques, ce récit évoque aussi un apprentissage initiatique mené à l'écoute des mythes et des chants magiques, de l'interprétation des rêves et de l'enseignement des chamans. Une pensée riche et poétique s'en dégage, bouleversant nos conceptions de la connaissance, du sentiment religieux et des rapports à la nature. Des fondements de la violence collective à la logique de la sorcellerie, des principes de l'autorité politique à la définition de l'identité culturelle, de la philosophie de l'échange à l'intelligence de l'environnement, ce témoignage exceptionnel sur une manière libre, et presque oubliée, de vivre la condition humaine tire d'une expérience singulière un enseignement pour le temps présent.
Comment les modes de vie en quête d'autonomie transforment-ils nos façons de percevoir monde ? Menant l'enquête à travers les lieux de vie alternatifs, Clara Breteau examine quels mondes sensibles nouveaux se déploient quand on construit soi-même sa maison, quand on cultive sa nourriture, quand on fabrique son énergie. C'est tout une poétique nouvelle qu'elle voit poindre dans les endroits les plus inattendus.
Plus secrète que La Mecque, plus difficile d'accès que Lhassa, il existe au coeur de la jungle birmane une petite cité inconnue des hommes et qui règne pourtant sur eux par ses fabuleuses richesses depuis des siècles : c'est Mogok, citadelle du rubis, la pierre précieuse la plus rare, la plus chère, la plus ensorcelante. Mogok, perdue dans un dédale de collines sauvages par-delà Mandalay. Mogok autour de laquelle rôdent les tigres. La légende assure qu'aux temps immémoriaux un aigle géant, survolant le monde, trouva dans les environs de Mogok une pierre énorme, qu'il prit d'abord pour un quartier de chair vive tant elle avait la couleur du sang le plus généreux, le plus pur. C'était une sorte de soleil empourpré. L'aigle emporta le premier rubis de l'univers sur la cime la plus aiguë de la vallée. Ainsi naquit Mogok...
Ce dictionnaire, d'une ampleur et d'une ambition sans équivalent, rassemble, sous la direction de Jean-Claude Monod, les éléments d'une pensée et d'une vie qui se trouvèrent au point de convergence, et parfois de friction, de nombreuses disciplines - philosophie, anthropologie, linguistique, sociologie, mythologie comparée, histoire de l'art, poétique... - et de plusieurs continents - Europe, Amériques du Sud et du Nord, Asie... L'oeuvre de Claude Lévi-Strauss transforma en profondeur non seulement les sciences sociales du xxe siècle, mais le regard que nos sociétés portent sur " les autres ", d'abord sur ces peuples qu'on appela longtemps - avant Lévi-Strauss, justement - " primitifs " et, par là, sur nous-mêmes.
L'ouvrage parcourt l'intégralité des livres du grand anthropologue, les concepts qu'il a marqués de son empreinte, et nous éclaire aussi sur les rencontres qui ont été déterminantes dans son existence intellectuelle et personnelle. Sa vie est traitée comme un " fait biographique total " où les noms des maîtres et des collaborateurs, des lieux et des textes, des peuples et des notions sont autant d'entrées vers une oeuvre-monde.
Riche de multiples contributions françaises et étrangères, ce volume montre combien la pensée de Lévi-Strauss est animée par une quête de " sagesse " pratique visant à réformer notre civilisation et à réorienter le cours de nos sociétés. Ses réflexions engagent non seulement une idée de l'humanité - dans son unité et ses différences, dans ses liens vitaux avec la nature -, mais une conscience aiguë des conditions précaires de sa survie.
Les Occidentaux ont toujours considéré qu'il était normal d'avoir
peur de l'océan, de vouloir le
dominer et d'
exploiter inconsidérément ses ressources par le recours à la technique : navires, instruments de navigation, cartes. Nous avons longtemps cru qu'il n'existait pas d'autres rapports possibles à la mer et que notre approche matérialiste était universelle. Or, l'exploration du Pacifique va tout changer.
Quand les premiers explorateurs occidentaux sont arrivés dans les îles du Pacifique, ils ne pouvaient pas comprendre comment les " natifs " s'étaient déplacés sur des milliers de kilomètres, d'îles en îles, sans aucune médiation technologique comparable aux leurs. L'espace objectif des cartes modernes ne correspondait pas à la perception spatiale qui était la leur. La distance n'était pas pour eux une donnée stable. D'où une " cartographie sensorielle " où les repères sont les bancs de poissons, les volées d'oiseaux, le bois flotté, les mouvements des vagues, le ciel, etc. Un groupement de requins, des poissons volants, des méduses, des marsouins, des oiseaux, la couleur de l'eau étaient autant d'indices qui permettaient de se situer. C'est cette
perspective pacifique qu'Hélène Artaud nous fait découvrir.
Cette rencontre a-t-elle provoqué chez les Occidentaux un tournant écologique ? Si la rencontre avec le Pacifique a pu changer la perception occidentale de l'océan au point d'en faire ce milieu intime, vulnérable et sensible, l'anthropologue interroge la profondeur de ce changement. Le " tournant " océanique des Modernes est peut-être moins l'annonce d'une rupture que l'indice d'une continuité...
Résoudre les énigmes posées par les règles du mariage aux ethnologues, notamment celle de la prohibition de l'inceste, telle est la tâche que se proposaient initialement Les Structures élémentaires de la parenté.
Les deux chapitres introductifs, objets de la présente édition, n'en abordent pas moins des questions philosophiques cruciales : où finit la nature et où commence la culture ? Quelles sont les parts respectives de chacune en l'homme ? Comment l'homme se distingue-t-il, sous ce rapport, de l'animal ? C'est ainsi du point de vue de l'ethnologie que le texte de Lévi-Strauss apporte matière et méthode à la réflexion philosophique.
Dossier
1. Glossaire
2. Auteurs
3. Anthologie.
Marqué par l'histoire coloniale, les discriminations, les violences, l'expropriation des terres, l'exploitation des ressources locales et l'avidité des colons, le peuple Awajun subit les affres de la globalisation. Dans cette tourmente, Albertina résiste. Sa force ? Elle la tire de la nature. Au coeur d'une cosmologie vivante, gravée dans sa mémoire, incarnée dans ses actes. De l'enfance à l'âge adulte, de l'intime au social, de la poésie au politique, du local au global, son chemin n'aura de cesse de défendre le vivant. Ce profond récit de vie nous plonge entre deux mondes, sous le regard lucide d'une femme éprise de liberté.
L'Étoffe du diable
La rayure et les étoffes rayées sont longtemps restées en Occident des marques d'exclusion ou d'infamie. En furent notamment vêtus tous ceux qui se situaient aux marges de la société chrétienne ou bien en dehors : jongleurs, musiciens, bouffons, bourreaux, prostituées, condamnés, hérétiques, juifs, musulmans ainsi que, dans les images, le Diable et toutes ses créatures. Sans faire disparaître ces rayures très négatives, l'époque romantique voit apparaître une nouvelle forme de rayures, positives et liées aux idées nouvelles de liberté, de jeunesse et de progrès. Dans les sociétés contemporaines, ces deux types de rayures cohabitent : celles des vêtements de prisonniers, de la pègre, des lieux dangereux et celles du jeu, du sport, de l'hygiène et de la plage.
Michel Pastoureau
Historien, spécialiste des couleurs, des images et des symboles, il est directeur d'études à l'École pratique des hautes études. Il a notamment publié Bleu, Une histoire symbolique du Moyen Âge occidental, Le Petit Livre des couleurs (avec Dominique Simonnet), L'Ours et Noir.
L'histoire d'un éternel promeneur solitaire, Jacques Laccarière : une liaison heureuse de plus de vingt ans avec une terre, un peuple et une histoire.
C'est sous les portiques de l'Agora d'Athènes où la foule de ses auditeurs, abritée du soleil, venait écouter Hérodote relater ses voyages, que l'on aimerait lire, ou mieux encore entendre lire, L'été grec.
Car ce livre est une approche vivante, un témoignage passionné, l'histoire d'une liaison heureuse de plus de vingt ans avec une terre, un peuple et une histoire.
L'originalité de l'approche de Jacques Lacarrière réside, littéralement, dans sa démarche. Tels ces ascètes en quête d'un "homme différent", vivant - ivres de Dieu - aux frontières de la mort.
Et il devient alors évident que ce que cherche sans relâche sur la terre hellène ce promeneur solitaire, il l'a déjà trouvé en lui-même.
A travers le quotidien, les gestes et la langue populaires, dans un style impressionniste où se retrouvent l'harmonie de Sophocle, les chants médiévaux de Digenis, les mémoires du général Makryannis et les Kleftika, ces chants épiques de la guerre d'indépendance, nous passons tout naturellement de l'autre côté du miroir pour retrouver le fil qui relie Eschyle à Séféris, Homère à Elytis et Pindare à Ritsos.
A la manière enfin dont on a dit du printemps 68 français qu'il fut "chaud", on peut parler de la chaleur et du souffle libertaire de L'été grec.
Mais le plus rare peut-être en ce beau livre est que l'exceptionnelle érudition de l'auteur n'ait en rien entamé l'étonnement, la jeunesse et l'acuité de son regard.
Grand Prix de Littérature de l'Académie Française pour l'ensemble de son oeuvre.
" Il y a maintenant presque huit ans, je me suis retrouvée de façon inattendue éperdument amoureuse d'une chienne rouge piment que j'ai appelée Cayenne. "
C'est en partant des gestes les plus ordinaires du quotidien et non pas de grands principes que Donna Haraway nous invite à penser notre relation aux espèces compagnes. Ces espèces avec lesquelles nous " partageons le pain ", depuis les micro-organismes qui nous peuplent jusqu'aux animaux de compagnie.
Cet enchevêtrement nous conduit auprès de bouledogues français à Paris, à des projets concernant les prisonniers du Midwest, à des analyses coûts-bénéfices dans la culture marchande autour des chiens, à des souris de laboratoire et des projets de recherche en génétique, sur des terrains de baseball et d'agility, auprès de baleines munies de caméras au large de l'Alaska, sur des sites industriels d'élevage de poulets, etc.
Il s'agit ici non pas de domestication, de contrôle ou de rachat de la dette mais de contact. Quelle est la valeur ajoutée du contact ? Que nous apprennent à sentir et à faire les " zones de contact " ? Loin de tout retour romantique à une rencontre sauvage, dénuée d'intérêts et de contamination biopolitique, prendre soin du contact entre espèces " entraîne " à un perpétuel zigzag entre ce qui nous affecte, nous rattache, nous rend interdépendants, simultanément robustes et vulnérables.
1953. Voici Joseph Kessel dans un Kenya en révolte contre la Couronne d'Angleterre. Puis sur la route des Merveilles, du lac Victoria au Kilimandjaro, entre colons et guerriers Masaï. Partout, il s'émerveille d'une poésie à l'état brut, d'un paysage spirituel de tapisserie de Dame à la Licorne : Quand je me réveillai une minuscule gazelle couleur de châtaigne, avec deux aiguilles pour cornes et deux dés de velours pour sabots, se promenait autour de mon lit... Des reportages exceptionnels, à l'origine du Lion.
En 1930, alors que, surréaliste dissident, il travaillait à la revue Documents, Michel Leiris fut invité par son collègue l'ethnographe Marcel Griaule à se joindre à l'équipe qu'il formait pour un voyage de près de deux ans à travers l'Afrique noire.
Écrivain, Michel Leiris était appelé non seulement à s'initier à la recherche ethnographique, mais à se faire l'historiographe de la mission, et le parti qu'il prit à cet égard fut, au lieu de sacrifier au pittoresque du classique récit de voyage, de tenir scrupuleusement un carnet de route. Mais, tour personnel donné à cette pratique, le carnet de Michel Leiris glissa vite vers le journal intime, comme s'il était allé de soi que, s'il se borne à des notations extérieures et se tait sur ce qu'il est lui-même, l'observateur fausse le jeu en masquant un élément capital de la situation concrète. Au demeurant, celui pour qui ce voyage représentait une enthousiasmante diversion à une vie littéraire dont il s'accommodait mal n'avait-il pas à rendre compte d'une expérience cruciale : sa confrontation tant avec une science toute neuve pour lui qu'avec ce monde africain qu'il ne connaissait guère que par sa légende ?
On a parfois l'impression que les espèces végétales et animales ont appris à se dissimuler au regard des humains. Est-ce le résultat de l'usage des pesticides et du réchauffement climatique ?
Vanessa Manceron s'est intéressée à une pratique scientifique discrète mais de plus en plus indispensable : connaître et reconnaître les plantes, les oiseaux, les papillons et autres insectes, les mondes vivants, tout autour de nous. Pour l'observer le mieux était d'aller en Angleterre, où la tradition naturaliste fait se côtoyer professionnels, universitaires et amateurs. Ce travail n'y est pas tenu pour un passe-temps marginal, mais considéré comme nécessaire. Cette science participative s'apparente à un savoir déambulatoire qui se déploie selon ses propres règles, en s'immergeant dans un territoire précis, délimité, pour y documenter régulièrement et systématiquement les espèces présentes, montrer comment elles se développent, gagnent du terrain ou régressent, voire disparaissent. Il faut apprendre à repérer les moindres indices, à les photographier mais aussi à les dessiner.
On suivra ainsi les plantes, les papillons comme les multiples oiseaux présents dans nos champs en apprenant une autre manière de regarder, de se rendre sensible aux minuscules différences, aux sons, aux variations de couleurs. Et ainsi toucher du doigt une autre manière de vivre et d'habiter.
À la lumière de ses études éthologiques, qui cherchent à observer le comportement des êtres vivants dans leur univers naturel, Boris Cyrulnik jette un regard nouveau sur le comportement amoureux des humains. La compréhension du monde animal et la biologie le conduisent à livrer de nouvelles interprétations sur les liens naturels qui unissent une famille. On découvre ainsi que l'histoire affective du bébé commence bien avant sa naissance et que la force des liens bébé-père-mère pèse sur l'individu dès la formation de la cellule embryonnaire et l'influence toute sa vif durant.
Boris Cyrulnik nous offre ici la première histoire naturelle de l'attachement.
Neurologue et psychiatre, Boris Cyrulnik a publié de nombreux best-sellers, et dans la collection « Pluriel » La Fabuleuse Aventure des hommes et des animaux et Mémoire de singe et paroles d'homme.
Laissez-vous entraîner par Carlos Castañeda dans une aventure aussi merveilleuse que riche d'enseignements. Et entrez au coeur de la transmission chamanique des sorciers indiens du Mexique. Pour ces derniers, il existe d'autres mondes que le rêve peut nous aider à découvrir en dépassant nos illusions à propos de l'espace, du temps et du moi. Dans ce livre, devenu un classique, l'auteur nous offre un témoignage palpitant sur les ressources insoupçonnées de l'être humain, un guide pour une meilleure perception de l'univers... et de nous-même.Carlos CASTAÑEDA, anthropologue américain d'origine péruvienne, s'est initié dans les années 1970 au chamanisme. Il entreprend au cours des années suivantes de relater son expérience mystique. Ses ouvrages rencontrent un immense succès.
"Le harem et les cousins est un ouvrage remarquable et dérangeant à plusieurs titres. Il dérange par la vigueur de ses hypothèses et l'ampleur des problèmes qu'il soulève, par les liens qu'il établit entre une histoire plurimillénaire et les réalités les plus quotidiennes, enfin par son extraordinaire liberté de ton pour traiter de choses graves. Avec cette oeuvre prend véritablement corps en France une anthropologie de la Méditerranée faisant ressortir des parentés structurelles, jusque-là plus ressenties qu'analysées, entre les sociétés établies autour de cette mer. Le titre du livre choisi par l'éditeur reflète mal la portée du propos qui ne se cantonne pas à l'aire arabo-musulmane mais embrasse tout le monde méditerranéen. La focalisation sur le premier mot du titre a pu donner à penser que Le harem et les cousins était un pamphlet contre l'Islam. Au contraire Germaine Tillion montre, à de multiples reprises, que les pratiques sont plus rétrogrades que les prescriptions coraniques. Le régime dictatorial iranien, contre lequel s'élève une courageuse révolte, n'en fournit-il pas la preuve ? Au total, ce livre audio est une vaste fresque, brossant, dans toute son extension géographique et historique, les caractéristiques du monde méditerranéen et proche-oriental."
Christian BROMBERGER & Patrick FRÉMEAUX
"Lorsque Germaine Tillion écrit « Il était une fois l'ethnographie », elle est alors au crépuscule de sa vie ; il s'agissait pour elle de revenir sur ses notes et travaux réalisés auprès de la population berbère de l'Aurès en Algérie, entre 1934 et 1940. Ces derniers devaient faire l'objet d'une thèse, qui n'a jamais pu voir le jour à cause de la Deuxième Guerre mondiale. Elle restitue ici son expérience de jeune ethnologue avec humour et un sens du récit unique. La comédienne Roselyne Sarazin parvient à retranscrire toute la force et l'espièglerie de ce texte.
Grande figure qui a traversé le XXe siècle, Germaine Tillion (1907-2008) est une ethnologue et historienne au parcours hors du commun. Elle fut l'élève de Marcel Mauss, résistante dans le Réseau du Musée de l'Homme, déportée à Ravensbrück et engagée tout au long de sa vie en faveur du droit des femmes, des prisonniers et de la décolonisation. En entrant au Panthéon en 2015 pour son engagement pendant la Deuxième Guerre mondiale mais aussi pour l'importance de ses écrits, fonctions et prises de positions humanistes, Germaine Tillion est la première ethnologue à recevoir l'hommage de la Nation et, à ce jour, la deuxième femme scientifique après Marie Curie."
Patrick FRÉMEAUX & Christian BROMBERGER